Un appel unifié d’ENSIE, RREUSE, Social Firms Europe – CEFEC et CEC.
A l’attention des Présidents et représentants des institutions européennes et des Membres du Parlement européen,
A l’attention des représentants des Gouvernements,
Depuis plusieurs semaines l’Europe vit une période de confinement afin de lutter contre la propagation du Coronavirus. Vous le savez, la restriction des déplacements de population a eu pour conséquence le ralentissement et même la fermeture de nombreuses entreprises, mettant un coup d’arrêt à l’économie des pays. Les associations et entreprises inclusives que nous représentons sont également fortement touchées dans leurs activités et une majorité d’entre-elles sont contraintes d’arrêter le travail. Le sort des personnes que nos structures accompagnent chaque jour est également préoccupant. C’est le cas notamment des personnes peu qualifiées, des jeunes, des chômeurs de longue durée, des personnes au-delà de 50 ans et des personnes appartenant aux minorités désavantagées. Nous devons également considérer les personnes autrement marginalisées socialement, notamment les femmes et les migrants. Les Entreprises sociales d’insertion (ESI)[1] et leurs employés, particulièrement les plus fragilisés, sont profondément préoccupés par la situation actuelle. Nous demandons, ensemble, avec les différents réseaux représentants les ESI, les actions suivantes pour alléger le poids de la crise sur ce secteur déjà sensible.
Nous saluons les annonces de la Commission européenne faites la semaine dernière. Cependant, nous demandons que les actions suivantes soient prises en considération :
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S’assurer et contrôler que les États membres prennent en compte les ESI et leurs employés et les soutiennent.
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Veiller à ce que les plus vulnérables soient directement concernés par la proposition de la Commission européenne dans son Initiative d’investissement dans la lutte contre le Coronavirus pour faciliter le déploiement du “Fonds social européen pour soutenir temporairement les régimes nationaux de travail de courte durée qui contribuent à amortir l’impact du choc” et en bénéficient effectivement.
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Développer un cadre flexible pour les aides d’État : autoriser des seuils plus élevés pour les aides à l’emploi et les aides ‘de minimis’ pour les ‘travailleurs défavorisés et les travailleurs gravement défavorisés’.
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Développer un cadre fiscal flexible pour la suspension des paiements de la taxe sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations sociales…
Tous les États, qu’ils soient membres de l’Union européenne, pays candidats ou membres du Partenariat oriental, sont en première ligne dans la lutte contre le Coronavirus, mais aussi de ses conséquences économiques et sociales. Dans certains États, les ESI et les formes alternatives d’emploi intégré et inclusif, sont largement reconnues et les mesures prises pour atténuer la crise seront à même de les aider. Dans d’autres États, le secteur n’est pas reconnu, même s’il existe, et dans certains d’entre eux, les politiques entrepreneuriales sont moins développées de manière générale, notamment celles qui concernent les ESI. C’est également dans ces États qu’il y a les plus grands risques pour le secteur des ESI car il est encore jeune et fragile, il faudra donc veiller à ce que le secteur ne soit pas laissé de côté.
Afin d’aider les PME en général et les ESI en particulier, nous nous félicitons des mesures annoncées par certains États, comme la France[2] ou les Pays-Bas[3], et nous recommandons à tous les États de mettre en œuvre les considérations et les propositions suivantes :
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S’assurer que le soutien au travail et aux salaires concerne tous les travailleurs et plus particulièrement les plus fragiles.
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S’assurer que les fonds déjà alloués au financement des entreprises sociales ne soient pas suspendus et que leur paiement sera respecté, dans les délais prévus, sans obligations ultérieures, même si les activités sont suspendues ou arrêtées.
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Ces acteurs économiques fournissent des SIEG (Services d’intérêt économique général), qui sont plus cruciaux que jamais en cette période de crise et devraient être la priorité dans chaque mesure adoptée.
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Accepter, pour un temps, davantage de flexibilité dans l’application de la réglementation sur les ESI, afin qu’elles ne perdent pas leur qualification. Par exemple, accepter plus de flexibilité concernant la proportion des travailleurs du public cible dans l’effectif complet.
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S’assurer que tous les financements nationaux et les programmes de soutien aux entreprises visant à atténuer les pertes financières dues à la pandémie de coronavirus soient également accessibles aux ESI, aux organismes à but non lucratif et entreprises de l’économie sociale.
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Assurer des conseils et un soutien aux ESI et aux groupes vulnérables pendant cette période difficile, par exemple en augmentant l'accessibilité des plateformes/outils en ligne pour les entreprises sociales qui fournissent des conseils
En ces temps difficiles, ENSIE, RREUSE, Social Firms Europe – CEFEC et CEC sont à votre disposition si vous avez besoin de conseils ou si vous voulez connaître les bonnes pratiques mises en œuvre dans d’autres pays pour aider le secteur des ESI à poursuivre leur mission.
Les ESI font partie d’une famille plus large, l’économie sociale, et nous appelons à des mesures de soutien qui pourront aider toutes les entreprises de l’économie sociale pendant ces temps difficiles, représentées par Social Economy Europe.
[1] Les différents acteurs économiques qui s’efforcent de mettre en place des formes d’emploi plus inclusives et plus intégrantes, les ateliers protégés, les coopératives sociales et ainsi que les organisations offrant des conseils et des formations pour rendre ce type d’entreprises sociales plus visibles.
[2] En France, un Fonds de solidarité a été mis en place pour les petites entreprises afin de couvrir leurs pertes de chiffre d’affaires. A également été mis en place un régime de travail à temps partiel pour permettre aux entreprises, dont les salariés sont confrontés à des pertes de salaire, de bénéficier d’une allocation spécifique de l’État. Il y aura la possibilité pour les salariés qui font face à une diminution de leur activité de bénéficier de formations afin d’investir dans leurs compétences. Les entreprises pourront également demander un prêt bancaire de trésorerie garanti par BPI France à hauteur de 90%. Le ministère du Travail, comme les acteurs de la finance solidaire, sont aussi mobilisés pour apporter des réponses complémentaires aux entreprises inclusives. A ce titre, des webinaires réguliers sont organisés depuis mercredi 18 mars, avec les différentes structures du secteur pour leur faire part des avancées et écouter leurs remontées.
[3] Aux Pays-Bas également, des mesures énergiques ont été prises en faveur des PME. Par exemple pour permettre aux entreprises de continuer à rémunérer leur personnel. Les entrepreneurs qui prévoient une perte de chiffre d’affaire d’au moins 20% peuvent demander une contribution de l’État pour une période de trois mois (jusqu’à 90% de la masse salariale, en fonction de la perte de chiffre d’affaire). Ils bénéficieront d’une avance de 80% de la contribution demandée. Il y aura également, comme dans beaucoup de pays, un report d’impôts : impôts sur le revenu, sur les sociétés, sur les salaires et sur le chiffre d’affaires. Les amendes dues aux retards de paiements seront réduites. L’État proposera une garantie de 50% sur les prêts et garanties bancaires. En outre, les petits entrepreneurs bénéficiant de microcrédits auront une réduction de leurs intérêts.